Quelle structure pour un projet non lucratif : association, fondation ou fonds de dotation ?
- Baptiste Feuvrier
- 24 mars
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 29 mars
La création d’une structure juridique adaptée constitue une étape déterminante dans la concrétisation d’un projet à but non lucratif. Choisir la bonne forme permet de sécuriser les actions à venir, de garantir une gouvernance cohérente, et surtout, de bénéficier des dispositifs fiscaux ou de financement approprié.
Quels critères prendre en compte dans le choix d’une structure ?
Plusieurs éléments doivent être étudiés en amont de votre projet pour choisir la structure juridique la plus adaptée :
Quel est l’objet du projet ? Le choix d’une fondation ou d’un fonds de dotation nécessite une activité ayant un caractère d’intérêt général.
Combien de personnes sont à l’origine du projet ? Une association implique nécessairement un collectif (au moins deux membres), tandis qu’une fondation ou un fonds de dotation peuvent être créés par une seule personne physique ou morale.
Quels sont les moyens financiers disponibles ? La fondation nécessite un apport initial élevé, un fonds de dotation peut être créé avec un capital relativement limité, tandis qu’une association peut exister sans aucun apport de départ.
Quel niveau de formalisme et de contrôle êtes-vous prêt à accepter ? La fondation, notamment lorsqu'elle reconnue d’utilité publique, impose des exigences strictes en matière de gouvernance, de suivi, et de validation administrative. L’association, à l’inverse, offre une grande liberté d’organisation, sauf si elle est, elle-même reconnue d'utilité publique.
Quelles sont les sources de financement envisagées ? Si votre projet vise à solliciter des subventions publiques, l’association est généralement plus adaptée. En revanche, les fondations et fonds de dotation sont particulièrement propices à la réception de dons, donations et legs de la part de mécènes, avec des régimes fiscaux attractifs.
L’association loi de 1901
L’association est régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association. Elle constitue la forme la plus accessible pour les projets non lucratifs et repose sur la volonté d’au moins deux personnes d’unir leurs moyens autour d’un objet commun, sans recherche de profit personnel.
Les principales caractéristiques de l’association sont :
La simplicité de sa création : la constitution d’une association requiert uniquement la rédaction de statuts, la désignation d’une gouvernance (souvent un bureau et un conseil d’administration), puis une déclaration en préfecture. Aucun capital minimum n’est exigé.
Une gouvernance libre : les membres bénéficient d’une grande liberté contractuelle dans l’organisation interne. Les statuts peuvent définir précisément les règles de gouvernance, de prise de décision, d’adhésion ou d’exclusion.
Des sources de financements diversifiés : une association peut recevoir des dons manuels (cotisations de ses membres par exemple), des subventions publiques (État, collectivités), et, si elle reconnue d’intérêt général ou d’utilité publique, des donations par acte notarié et des legs (article 6 de la loi de 1901 précitée). Dans ce cas, elle peut également délivrer des reçus fiscaux ouvrant droit à une réduction d’impôt pour les donateurs au titre de l’article 200 du code général des impôts.
Un régime fiscal avantageux : une association qui exerce exclusivement des activités non lucratives n’est pas soumise aux impôts commerciaux (TVA, impôt sur les sociétés, CFE). Si elle développe une activité commerciale accessoire, elle peut bénéficier d’une exonération à condition que sa gestion soit désintéressée, que l’activité lucrative reste marginale, et qu’elle ne concurrence pas directement le secteur lucratif.
En particulier, une association est reconnue d’intérêt général si elle remplit trois conditions : l’association ne fait pas l’objet d’une gestion intéressée, n’exerce pas d’activité lucrative et ne fonctionne pas au profit d’un cercle restreint de personnes.
Une association d’intérêt général peut, sous certaines conditions, demander la reconnaissance d’utilité publique après trois ans d’existence. Cette reconnaissance est accordée par décret en Conseil d’État, sous réserve de remplir des critères stricts d’activité, de gouvernance et de rayonnement (article 10 et article 11 de la loi de 1901 précitée).
La fondation
L’article 18 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le développement du mécénat définit comme « l'acte par lequel une ou plusieurs personnes physiques ou morales décident l'affectation irrévocable de biens, droits ou ressources à la réalisation d'une œuvre d'intérêt général et à but non lucratif ». Il ne s’agit pas de réunir des membres autour d’un projet, mais d’affecter de manière irrévocable un capital à la réalisation d’une œuvre d’intérêt général.
On distingue différents types de fondation :
La fondation reconnue d’utilité publique (FRUP)
Création soumise à un décret du Conseil d’État.
Nécessite un capital initial élevé (1,5 million d’euros minimum).
Gouvernance encadrée, avec obligation d’indépendance vis-à-vis des fondateurs (conseil d’administration ou directoire avec conseil de surveillance).
Peut recevoir des dons, donations et legs sans autorisation préfectorale.
Peut émettre des reçus fiscaux et est exonérée d’impôt sur les sociétés sur ses revenus patrimoniaux.
La fondation abritée
Créée sous l’égide d’une fondation reconnue d’utilité publique dite "abritante".
Ne possède pas de personnalité morale propre.
Ne peut recevoir dons ou legs que par l’intermédiaire de la fondation abritante.
Fonctionne selon une convention qui définit les modalités de gouvernance et d’utilisation des fonds.
Création simplifiée, avec un capital recommandé d’environ 150 000 €.
La fondation d’entreprise
Créée par une ou plusieurs sociétés pour réaliser des actions d’intérêt général.
Capital minimum de 150 000 €, étalé sur 5 ans.
Conseil d’administration obligatoire, incluant fondateurs, représentants du personnel, et personnalités extérieures.
Ne peut recevoir ni dons de particuliers, ni legs.
Les fondations spécifiques
Elles sont réservées à des domaines d’activité particuliers : fondations universitaires, de coopération scientifique, hospitalières ou partenariales.
Leur cadre juridique est adapté aux enjeux du secteur concerné, en lien avec les institutions publiques ou les établissements d’enseignement supérieur.
Le fonds de dotation
Créé par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie (dite "LME"), le fonds de dotation est une structure juridique souple qui permet d’affecter un patrimoine à une mission d’intérêt général. Il représente une alternative intermédiaire entre l’association et la fondation.
Les principales caractéristiques du fonds de dotation sont :
Une création rapide et peu contraignante : il suffit d’une déclaration en préfecture, accompagnée des statuts. La dotation initiale minimale est fixée à 15 000 €, devant être versée intégralement dans les six mois suivant la création, conformément au décret n° 2022-813 du 16 mai 2022 modifiant le décret n° 2009-158 du 11 février 2009 relatif aux fonds de dotation.
Une gouvernance flexible : Le fonds de dotation dispose comme l’association de la liberté statutaire. Il doit cependant être dirigé par un conseil d’administration et rester dans le cadre de sa mission d’intérêt général.
Financement privé uniquement : le fonds peut recevoir des dons manuels, des donations et des legs sans passer par une autorisation préfectorale. En revanche, il ne peut pas percevoir de subventions publiques.
Régime fiscal attractif : les donateurs peuvent bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu ou sur les sociétés, comme pour les associations d’intérêt général. Toutefois, les dons effectués au profit d’un fonds de dotation n’ouvrent pas droit à la réduction d’impôt sur la fortune immobilière (IFI), contrairement à ceux versés à certaines fondations.
Quelle structure juridique pour votre projet ?
L’accompagnement d’un avocat d’affaires est utile pour déterminer la structure juridique qui s’adaptera le mieux aux spécificités opérationnelles, financières et juridiques de votre projet et vous accompagner le long de sa création.
Une association est idéale pour les projets participatifs portés par plusieurs personnes, avec peu de moyens initiaux, souhaitant s’inscrire dans une dynamique territoriale, associative ou citoyenne, et sollicitant des financements publics.
A l’inverse, il est préférable de constituer une fondation pour des projets structurés autour d’un capital significatif, avec une ambition de long terme, et un objectif d’intérêt général exigeant une reconnaissance officielle ou une gouvernance encadrée.
Enfin, la création d’un fonds de dotation se destine à des projets individuels ou portés par une seule entité (personne physique ou morale), avec une logique de financement privé et de gestion patrimoniale, sans recours aux aides publiques.
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Thomas & Thomas, cabinet d'avocats exerçant en droit des affaires et en droit public, conseille et défend les dirigeants, les entrepreneurs et les investisseurs dans leurs activités. Il accompagne régulièrement les dirigeants associatifs, les présidents de fondation et les mécènes dans toutes les démarches juridiques visant à assurer la pérennité et le développement de leurs activités.